Alain Jacquet

Du camouflage à la trame 1962-1968

Pour sa seconde exposition à la Galerie Daniel Templon, Alain Jacquet présente une exposition historique consacrée à deux ensembles peu ou mal connus du public : les premières peintures de la série « Camouflage » (1961-1964) ; puis une sélection d’œuvres de 1968 – « Jute », « Bois», « Tôles ondulées » – qui explorent les procédés de reproduction mécanique et l’impression de trames.

Au début des années soixante, après une série de travaux sur les couleurs primaires et secondaires, Alain Jacquet se concentre sur les « Camouflages ». Ces peintures reposent sur un processus formel : superposer des images de l’histoire de l’art (Michel-Ange, Botticelli, Matisse) et des formes inspirées de la technique militaire du camouflage. Dès les « Images d’Epinal », cette démarche produit des images ambiguës difficiles à déchiffrer et qui encouragent une relecture décalée des chefs d’œuvres classiques et modernes. Dans les « Camouflages » suivants, Alain Jacquet télescope les œuvres d’art reproduites avec des images de la vie courante : pompes à essence, publicités, imagerie populaire. Avec ces deux séries, Alain Jacquet se rapproche des premières expériences du Pop Art Américain (Jasper Johns, Lichenstein, Warhol).

À partir de 1964, Jacquet utilise la sérigraphie, le plus souvent avec des trames agrandies qui font disparaître l’image lorsque le spectateur se rapproche de la toile. Le cliché photographique est agrandi, tramé en points et reporté sur toile par sérigraphie, ce qui le rend difficilement déchiffrable de près. Cette technique de fragmentation de l’image selon les lignes déformées de la trame ou l’agrandissement des points tient toujours du « camouflage ». Cependant elle introduit une nouvelle réflexion sur ce que Pierre Restany appelle le « mec art », un art réalisé mécaniquement sans intervention manuelle.

Les oeuvres de 1968 explorent précisément les différentes possibilités de reproduction mécanique. Alain Jacquet expérimente l’impression de trame fine: gaufrage des « Tôles ondulées », trame de tissus dans « Jute », planches dans « Parquet ». Dans ces objets à l’apparence minimaliste, Alain Jacquet marque sa différence du Pop Art Américain. L’utilisation d’objets de la vie quotidienne ne sert pas seulement un commentaire de la société de consommation ou un jeu sur le « ready-made ». L’impression d’une trame, sur un objet lui-même tramé (comme dans le sac de jute dans « Jute ») explore la distance mimétique entre les matériaux et leur reproduction, le réel et l’artificiel. Exposés en 1968, à la galerie Wadell à New York, c’est la première fois que ces oeuvres sont présentées dans leur ensemble en France.

L’artiste