Artiste pionnier des questions afro-américaines, Michael Ray Charles développe dès les années 90 une œuvre complexe autour de la représentation et de l’identité à travers le prisme de l’histoire américaine et sa culture populaire. Son travail est exposé régulièrement à la galerie Tony Shafrazi de New York de 1994 à 1999 mais aussi en Europe jusqu’au début des années 2000. Cependant, la réception controversée de son œuvre, couplée au sentiment grandissant d’une certaine inadéquation au monde de l’art, le poussent à se retirer de la sphère publique. Pendant près de deux décennies, il choisit de se concentrer sur le travail d’atelier et à ses propres recherches.

« VENI VIDI», grand retour de l’artiste sur la scène New Yorkaise, marque une nouvelle étape dans sa carrière. L’artiste élargit ici avec une grande justesse son prisme d’observation aux discriminations politiques. On retrouve dans ses tableaux des figures politiques, d’Abraham Lincoln à Lyndon B. Johnson qui ont marqué l’histoire de l’abolition de l’esclavage et de la ségrégation.  Il s’intéresse cette fois aussi plus largement aux grandes discriminations sociétales actuelles, de la question LGBTQ aux différences hommes-femmes.  L’exposition dévoile un ensemble de toiles grand format et une série de petits tableaux de portraits masqués et énigmatiques.

Charles jongle avec délicatesse entre l’idée et l’image, entre une palette burlesque, surréaliste et théatrale—à travers les « minstrel shows », ces spectacles populaires qui tournaient en dérision la communauté noire. Palette à laquelle il ajoute un nouveau vocabulaire, celui du dandysme, un style culturel agissant en marqueur sociétal fort, et celui de la mascarade, une mise en avant des traditions ancestrales africaines, pour décortiquer sous plusieurs angles ces questions sensibles.

L’ensemble manifeste à la fois une solide compréhension des enjeux politiques actuels et d’un désir toujours aussi ardent de dépasser ces différences raciales et sociétales. Apaisée, l’œuvre de Michael Ray Charles déploie ainsi une patte picturale plus lisse, peut-être la métaphore de canaux de communications plus consensuels.