Pierre et Gilles

Nuit électrique

Depuis plus de quarante ans, Pierre et Gilles réalisent des portraits oniriques à la frontière entre peinture et photographie. Avec leur nouvelle exposition « Nuit électrique » à Templon Paris, le duo assume sa longévité, sa place de portraitiste de l’époque et de pionnier des questions LGBTQIA+.

Pierre et Gilles – Nuit électrique, TEMPLON Paris, 2024. Photo © Adrien Millot
Pierre et Gilles – Nuit électrique, TEMPLON Paris, 2024. Photo © Adrien Millot
Pierre et Gilles – Nuit électrique, TEMPLON Paris, 2024. Vidéo © Sylvie Boulloud

« Une grande partie de notre exposition s’appelle Nuit électrique. C’est un thème de la nuit, un monde qu’on a beaucoup connu et qu’on aime bien. Ça rappelle un peu le Pigalle qu’on a connu adolescents quand on est arrivés à Paris. Ça peut être un peu partout, Shin-Juku, New York. C’est formidable la nuit parce que les gens sortent d’eux-mêmes et nous aussi. »

Pierre et Gilles

Pourtant c’est toujours quand on croit les connaître par cœur que Pierre et Gilles surprennent. Avec leurs nouveaux tableaux, créés au cours de ces deux dernières années, les artistes s’amusent de leur statut d’icônes pour dresser une galerie de portraits nocturnes et décalés.

Le couple formé par Pierre le photographe et Gilles le peintre a mis en place depuis 1976 un langage unique mêlant références à la culture populaire et à l’histoire de l’art, à la fois merveilleux et subversif, insolite et engagé. Hantée par la lumière artificielle des néons, leur nouvelle série, inédite, possède la lumière des bas-fonds et des paradis artificiels. Nostalgie euphorique des années Palace, la boîte mythique à laquelle ils sont si souvent associés, ou regard désabusé sur un monde où toutes les luttes sont peut-être gagnées ? Pierre et Gilles mettent en scène quelques-uns de leurs personnages favoris – le marin, l’ange, le voyou, le poulbot. Ils sont placés dans des espaces indéfinis, interlopes, entre le club, la fête foraine ou le cabaret. Leurs modèles, tantôt dénudés ou tatoués, couples amoureux ou solitaires désabusés, forment une foule aguicheuse, joyeuse, vaguement inquiétante. Au milieu de cette jeunesse gay, trans, métissée, Pierre et Gilles présentent deux autoportraits. L’un empreint d’une grave mélancolie les présente séparés. L’autre les campe en retraités guillerets, dans un décor de carte postale désuée. En jouant sur l’ambiguïté des registres, Pierre et Gilles embrassent avec humour leur univers « camp ». En creux, ils dessinent un monde trouble, oscillant entre optimisme et désillusion.

En contrepoint, Pierre et Gilles dévoilent deux portraits de leurs muses de longue date : Amanda Lear, en actrice de théâtre de boulevard, et Isabelle Huppert, en majestueuse Mary Stuart. Les deux éclairent par contraste l’originalité du nouveau travail sur la lumière de Pierre et Gilles. Le traitement de l’éclairage artificiel, cru, qui jamais ne décline, mais transfigure les êtres, est un des aspects les plus radicaux de leur pratique récente. Il peut être lu comme une puissante métaphore de la résistance au passage du temps qui nivelle tout, les existences et les combats. Quelle bienveillance la communauté LGBTQIA+ a-t-elle réussi à gagner après plus d’un demi-siècle d’avancées sociétales ? Quelle place et quelle considération pour les marginaux d’aujourd’hui ?

Over the Rainbow (Nassim Guizani et Lukas Ionesco)

Détails

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L’artiste

Pierre naît en 1950 à La Roche-Sur-Yon, Gilles au Havre en 1953. Mondialement connus, ils développent depuis 1976 une œuvre à quatre mains entre peinture et photographie. Leurs tableaux mettent en scène leurs proches, anonymes ou célèbres, dans des décors sophistiqués construits grandeur nature en atelier. Une fois la photographie tirée sur toile, commence un méticuleux travail de peinture. Ces créateurs d’images ont constitué une iconographie singulière explorant la frontière entre l’histoire de l’art et culture populaire.

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