Portraits
Après son exposition « Les Saintes Ellipses » dans le cadre du Festival d’Automne, qui était consacrée à une « tente » monumentale, Gérard Garouste présente des œuvres plus intimistes : autoportraits, portraits de commande et portraits de ses proches.
C’est la première fois que Gérard Garouste choisit de se confronter ainsi au réalisme et aux exigences du portrait.
Son exposition à la galerie Templon du 6 mars au 24 avril consiste en une vingtaine de portraits. Certains sont des portraits de commande, soit d’anonymes soit de personnes connues telles que Corinne Ricard. D’autres sont des portraits de ses proches, comme son épouse Elizabeth Garouste ou son fils Guillaume. Dans ces travaux, l’impératif de ressemblance n’est qu’un point de départ. Les corps se déforment avec les meubles, des animaux surgissent (loups, chiens ou chevaux) et les paysages de fonds retrouvent leur qualité onirique si caractéristique de l’œuvre de Garouste.
A travers cette nouvelle série d’œuvres, Gérard Garouste se confronte à la question du sujet et de la représentation mais aussi à un des genres les plus classiques de l’histoire de l’art. Cette idée lui est venue il y a deux ans, après son exposition « Kezive ou la ville mensonge » qui s’inspirait d’un texte de l’Ancien Testament. Gérard Garouste a pris conscience qu’il ne s’était jamais pleinement essayé à l’art du portrait, un aspect pourtant essentiel de l’histoire de la peinture. Il a donc choisi – en apparence – de délaisser son exploration des figures mythiques de l’art ou de la littérature qui ont si souvent nourri sa réflexion, pour se confronter aux exigences du réalisme. Alors que ses œuvres passées prenaient souvent naissance dans l’imaginaire, celles-ci s’ancrent dans la réalité et l’apparence de ses contemporains.
Pour réaliser ces portraits, Gérard Garouste a d’abord voulu rencontrer les modèles chez eux dans leur environnement familier, puis leur a demandé de poser pour quelques esquisses du visage et quelques prises photographiques. L’essentiel du travail s’est ensuite accompli dans l’atelier ; composition, fonds, positionnement des corps, développement de toute une « mythologie » de signes ou de symboles entourant le « héros ». Les visages n’ont été peints que dans la dernière phase, ce qui donne à ces toiles un aspect ambigu. Les physionomies semblent aisément reconnaissables. Complices ou distants, les portraits révèlent chacun une humeur et une personnalité bien particulières. Pourtant, l’onirisme des décors, l’ajout de symboles appelant l’interprétation (boules de cristal, outils, meubles, plantes ou membres déformés) imposent au spectateur une nouvelle appréhension du portrait. Les personnages sont tour à tour familiers, mystérieux et inaccessibles.
Souvent qualifié de peintre « post-moderne », Gérard Garouste s’essaie donc encore une fois à un magistral retour à la tradition, mais en s’affranchissant de ses modèles, il la transcende, et pousse le spectateur à s’interroger sur la nature profonde de la peinture et de la représentation.
Né en 1946 à Paris, Gérard Garouste vit et travaille entre Paris et la Normandie. Il est l’une des figures majeures de la peinture française. Peintre et sculpteur, il est obsédé par les origines de notre culture, l’héritage des maîtres anciens et les mythes. Son histoire propre est à la base de son travail de “démontage des images et des mots”, de sa préoccupation pour les questions de l’origine, du temps et de la transmission. Ses toiles, faites d’associations d’idées, sont tour à tour inquiétantes et joyeuses, peuplées d’animaux parfois fantastiques et de différents personnages. Ses sources mêlent la Bible, la culture populaire et les grands textes de Cervantès à Rabelais.